Shopping! [Anna]

Malgré l'immense garde robe que les Fox avaient aménagée pour elle, Anna tenait plus que tout à ne pas les utiliser. Bien sûr, cela lui coûtait son envie toute féminine de changer de fringues douze fois par jours, mais pour l'instant elle tenait bon. D'ailleurs, elle avait décidé d'aller faire du shopping, histoire de trouver ses propres affaires. A la mort de ses parents, Anna avait hérité de tout. Prévenante, elle avait mis une partie de la bonne quantité d'argent qu'elle avait reçu de côté pour ses études et pour l'avenir, mais il lui restait tout de même beaucoup d'argent pour ses plaisirs, surtout que les Fox prenaient en charge l'intégralité des frais ménagers. Elle pouvait donc se permettre d'aller dans des boutiques d'un assez haut standing. La jeune fille avait pêché de quelques camarades de classe des infos sur les commerces alentours, et avait jeté son dévolu sur un grand magasin, très plébiscité par la communauté des filles bien vues du lycée. Non pas qu'Anna souhaitait en faire partie, elle trouvait déjà qu'on la remarquait un peu trop, mais elle n'avait pas d'autres pistes à suivre.

Elle entra donc dans le magasin, saluée par une bouffée d'air frais. Il faisait toujours bon dans les établissements californiens, qui dépensaient une fortune en climatisation. Anna se dirigea vers le rayon le moins peuplé. Malheureusement, et assez logiquement, c'était aussi le moins intéressant. Elle se joignit donc à contre cœur à la foule de filles qui se pressaient les unes contre les autres. De taille moyenne, voire petite, Anna parvenait à se glisser jusqu'aux fringues cherchant quelque chose de mignon et à sa taille. Ce jour-là, d'ailleurs, elle portait un short beige et un débardeur marron. Elle n'aimait pas montrer ses jambes pâles, mais la chaleur était trop étouffante pour qu'elle résiste à l'appel frais du short. Poussée au hasard, elle atterrit bientôt près d'une jeune femme qu'elle connaissait maintenant à plutôt bien connaître et qu'elle appréciait beaucoup. Karen, en effet, avait semblé aussi perdue et déroutée qu'elle à leur rentrée au lycée. Et Anna avait tout naturellement engagé la conversation. Comment résister d'ailleurs au charme frais et délicat de Karen ? Elle lui adressa un sourire lumineux :

"Hello ! Comment ça va ?"

Anna répondit aux deux questions dans la même phrase :

"ça va, et oui... Je suis de corvée, aujourd'hui, ajouta-t-elle dans un sourire".

En vérité, et Karen l'avait sans doute compris grâce au ton joyeux qu'elle avait utilisé, cela n'était qu'à moitié vrai. Anna aimait le shopping, à peu près comme n'importe quelle fille. Mais elle ne l'aimait quand il était calme, qu'il n'y avait pas trop de queue, de bruit, de crises d'hystérie ou autres trucs dans le genre. Le fait était qu'Anna n'avait pas besoin au sens premier du terme de nouvelles affaires. Elle s'appuya sur un portant, en tritura l'acier, se doutant que Karen attendait une justification. En effet, son amie savait que les Fox lui avait offert toute une armoire pleine à craquer de fringues fabuleuses. Cela ne gênait absolument pas Anna de le lui raconter, mais elle avait un peu peur de passer pour une fille pourrie gâtée qui gâchait de l'argent par fierté. Elle espérait simplement que Karen ne la verrait pas comme telle.

"En fait... Je n'ai pas envie d'utiliser les vêtements des Fox..."

Elle fit un sourire à son amie, et glissa rapidement sur le sujet. Karen était sans doute venue pour une bonne raison, et Anna avait envie de savoir laquelle. De toute manière elle ne voulait pas s'attarder sur ce qui se passait chez les Fox. Elle restait très discrète sur le malaise qu'elle ressentait lorsqu'elle restait chez les Fox. Elle n'avait aucune envie de leur jeter la pierre ouvertement alors qu'ils l'accueillaient chez elle. Même auprès de Karen, elle ne voulait pas se plaindre, question de fierté, encore et toujours :

"Alors, tu cherches quelque chose de précis ?"

[Pardon c'est vraiment pas terrible >.<]

Anna eut un léger sourire. Karen voulait se faire remarquer, hein ? Plutôt amusant lorsqu'on songeait que son amie, elle, aurait tout fait pour disparaître dans le fond d'un trou de souris. De plus, Anna ne voyait pas ce qui posait problème. Même si Karen était plutôt discrète, sa beauté la distinguait largement du lot. En effet, remarqua Anna, elle ne connaissait que peu de filles aussi jolies qu'elle. Ses grands yeux bleus lumineux, son teint sans défauts, ses beaux cheveux bruns, sa silhouette fine et délicate, ses traits réguliers... Elle ressemblait à une poupée de porcelaine, avec plus de caractère. Mais peut-être était ce cela qui encombrait Karen. De toute manière, Anna était toute disposée à l'aider quelque soit les raisons de son changement de style. Bien qu'elle soit mal placée pour parler d'assurance, la jeune fille se permit une remarque :

"Si tu veux mon avis, la seule chose dont tu manques c'est de confiance en toi !"

Elle avait cependant dit cela sur un ton léger et joyeux, qui empêcherait sans doute Karen de se vexer. Pour éviter que son manque de délicatesse laisse un froid dans leur conversation amicale, elle enchaîna presque immédiatement :

"Tu sais, je suis sûre qu'une robe t' irait à merveille !"

Et Anna était absolument sincère comme à son habitude. Elle pensait qu'une petite robe légère irait parfaitement à Karen. La boutique se vidait peu à peu, comme si leur de la cohue était passée. Les groupes de filles déchaînées sortaient en gloussant, riant, se plaisantant, avec ou sans emplettes. Ravie de ce vide providentiel, et oubliant du même coup ses propres courses, Anna saisit Karen par la main pour la guider jusqu'au rayon des robes. Cherchant la tenue idéale en parcourant du regards les différents étaux, elle s'arrêta soudainement, et, lâchant Karen, elle s'avança vers un cintre qui portait une ravissante robe bleue, sans doute en mousseline tant elle était légère. Elle le décrocha et la tendit vers son amie :

"ça te plait ?"